mercredi 24 décembre 2008

Le grand voyage - Chapitres 7 et 8 (extraits)

Sur la route, Carole prit quelques clichés, notamment de bus en bois, sans fenêtres, qui semblaient être dans un état lamentable. La jeune fille fut étonnée de ne croiser pratiquement aucune voiture mais essentiellement des deux-roues et des bus. Elle remarqua que les gens étaient quasiment tous torse nu, les filles presque toutes en jupes très courtes. Beaucoup donnaient l’impression d’être sales.
Le taxi les déposa à la Plaza de Armas, devant l’hôtel principal de la ville, après avoir parcouru, trop rapidement au goût de l’adolescente, les cinq kilomètres qui le séparaient de l’aéroport. Carole n’en croyait pas ses yeux. Devant elle se dressait une maison de fer.
- C’est la première maison préfabriquée qui est arrivée à Iquitos en 1890. Elle a été dessinée par le constructeur de la célèbre Tour Eiffel à Paris, lui dit madame Auvegad.

Après une douche réparatrice et un rapide déjeuner, l’adolescente, en attendant que la femme fût prête pour un petit tour, complétait ses informations à propos de cette drôle de maison. Elle lut qu’un exploitant du caoutchouc revenant de l’Exposition Universelle de Paris en 1889 l’avait achetée.
- C’était un meccano géant en somme, raconta-t-elle à sa professeur, fabriqué initialement pour les fonctionnaires européens installés dans les colonies africaines.
La femme sourit du degré de curiosité de l’adolescente.
- Et ce n’est pas tout ! Quand la maison est arrivée, en kit, son acheteur s’est rendu compte qu’elle était beaucoup trop grande, mais qu’elle pouvait être divisée en deux parties similaires, ce qu’il a fait. Une seule des deux subsiste aujourd’hui, celle que nous avons vue. Elle ne fut jamais habitée car la journée, la chaleur y est intenable. Elle n’abrite qu’un petit bistrot ouvert uniquement le soir.



La vedette s’arrêta très souvent au début, avec des arrêts assez longs, mais on opta rapidement pour des haltes minutes, juste le temps d’échanger quelques mots avec les autochtones ou les voyageurs, souvent sur leur barque de bois, en ne placardant une photo que dans les endroits les plus stratégiques. Ici encore, mais toujours pour une bonne cause, on ne s’arrêta pas en route pour admirer la faune et la flore que la jeune fille devait se contenter de regarder ou de photographier à la va-vite. La jeune fille tâcha de mettre en mémoire ce qu’elle découvrait, pratiquement à chaque heure de la journée. Elle remarqua, par exemple, que les autochtones voyageaient en barque principalement, et transportaient dessus d’innombrables choses : des vélos, des arbres... enfin tout ce qui était nécessaire à leur vie dans les villages et qui pouvait se trouver parfois à plusieurs jours de la « civilisation », la seule véritable route étant le fleuve...



Devant la tournure que prenaient les choses avec cette gamine écervelée qui commençait à attirer l’attention, l’homme leur affirma son accord mais tint à attirer les femmes un peu à l’écart, devant une porte cochère.
Il faisait mine de montrer que c’était pour ne pas attirer trop les yeux sur l’argent, mais madame Auvegad sentant une menace, intima l’ordre à Carole de se tenir bien à l’écart, presque en bordure de la rue, à la vue de tout le monde possible. Elle avait bien vu car, à ce moment-là, l’homme attrapa la manche de la professeur, la forçant à faire un mètre à l’intérieur de la porte cochère, et voulant presque lui arracher l’argent des mains.
La femme tenait fermement la liasse dans son poing. Elle lui cria presque à la figure, en répétant plusieurs fois la phrase qu’elle avait fini par apprendre depuis le temps qu’elle participait à sa recherche.
- Donde esta mi marido ?
- Dites-nous où il est descendu et ma mère vous donne l’argent, renchérissait Carole en insistant elle aussi, ce qui avait pour effet de provoquer un stress chez l’homme.
Après un jeu d’intimidation qui ressemblait de plus en plus à une lutte, le Colombien attrapa les billets et les fourra dans sa poche. Puis, il fouilla toutes les poches possibles de la femme afin de vérifier si elle n’avait pas toute la somme sur elle. Ses recherches se révélant infructueuses, il vérifia le contenu du sac à main sans rien y prendre cependant, sous l’œil mauvais de l’adolescente qui, la professeur le vit, s’apprêtait à intervenir.
- Je t’interdis de t’approcher, lui cria-t-elle.

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